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conférence du mardi 12 octobre 2021: « Deux siècles d’industrialisation et de désindustrialisation en Alsace » par M. Nicolas Stoskopf


conférence du mardi 12 octobre 2021: « Deux siècles d’industrialisation et de désindustrialisation en Alsace » par M. Nicolas Stoskopf

 

Après plusieurs mois d’interruption causée par la crise sanitaire, le cycle des conférences proposées par la Société d’histoire d’Ensisheim a pu reprendre.
A la suite de l’ AG du 12 octobre 2021, nous avons ainsi pu accueillir M. STOSKOPF, professeur émérite à l’Université de Mulhouse, et spécialiste de l’histoire de l’industrie, sur le thème « Deux siècles et demi d’industrialisation et de désindustrialisation en Alsace».

Nous remercions la ville d’Ensisheim d’avoir mis à disposition la salle de la Régence et avons eu le plaisir d’accueillir une trentaine de personnes munies de leur passe sanitaire.

M. Stoskopf commence par expliquer qu’il n’y a pas l’industrialisation d’abord et la désindustrialisation ensuite, mais que les deux mouvements sont étroitement liés : quand la filature se mécanise au début du XIXe siècle, des milliers d’emploi de fileuses à domicile sont détruits…Ce qui compte pour un territoire, c’est le solde entre les deux mouvements. A l’échelle de la France, le tournant majeur se produit en 1974. En Alsace, il faut aussi se poser la question de l’impact des guerres et des changements de nationalité.

Il appuie sa démonstration sur des cartes réalisées pour l’Atlas historique d’Alsace, accessible en ligne ( http://www.atlas.historique.alsace.uha.fr/fr/ ) et en version papier publiée en 2019 (sous la direction d’Odile Kammerer).
Deux modèles principaux d’industrialisation caractérisent l’Alsace : dans les trois villes réformées, Mulhouse, Sainte-Marie-aux-Mines et Bischwiller (Bas-Rhin), un mouvement collectif mobilise les entrepreneurs pour produire un produit nouveau demandé par le marché : ainsi à Mulhouse, la fabrication des indiennes (toiles imprimées) à partir de 1746 déclenche une véritable révolution industrielle (filature, tissage, impression, chimie, constructions mécaniques) qui se répand dans les vallées vosgiennes et jusqu’à Colmar.

Au contraire, dans le Bas-Rhin, c’est un mouvement lent (et peu visible…) d’accumulation d’activités traditionnelles et artisanales mises en œuvre par une population essentiellement rurale, dispersée, mais également en surnombre et intéressée par des activités pouvant lui procurer un complément de ressources. Aux moulins, brasseries, tanneries, tuileries, poteries, etc… (souvent dirigés par des petits patrons protestants luthériens) s’ajoute le travail à domicile (tressage de chapeaux de paille en Alsace bossue, chaussons à Wasselonne, bonneterie à Barr, etc…). Finalement, ces activités font vivre autant de monde que la grande industrie haut-rhinoise vers 1870.
Ainsi les deux départements présentent des physionomies différentes :
les brasseries se trouvent surtout dans le Bas-Rhin, alors que le textile est concentré dans le Haut-Rhin.

Les guerres ont des répercussions sur la production industrielle.
L’annexion en 1870 a eu, dans un premier temps des conséquences négatives, car certaines productions (indiennes) étaient destinées au marché français .
Certains industriels ont quitté l’ Alsace pour s’installer ailleurs (et parfois avec leurs ouvriers comme c’est le cas pour une entreprise de Bischwiller partie avec les ouvriers s’installer à Elbeuf , dans la région de Rouen !) . Des investissements sont alors effectués dans les Vosges ou dans le Territoire de Belfort… Mais des investisseurs allemands apparaissent, intéressés d’abord par le secteur pétrolier (Pechelbronn). Strasbourg et sa banlieue connaissent une grande expansion: agro-alimentaire, industries d’équipement, entrepôts de charbon…Certaines entreprises deviennent des géants comme la SACM à Mulhouse.

La guerre de 14-18 est très difficile pour l’industrie alsacienne (proximité du front, manque de matières premières, méfiance des Allemands).
En 1918, les industriels allemands sont expulsés après le retour de l’Alsace à la France. Suit une période compliquée entre les deux guerres mondiales : certaines branches s’en sortent bien (brasseries, métallurgie), mais le textile doit trouver des débouchés sur les bouchés coloniaux.

Les « 30 glorieuses » (1945-1973) seront en Alsace synonyme de déclin pour de nombreuses entreprises et de mutations industrielles pour d’autres : la crise du textile entraine la fermeture définitive de nombreuses usines parvenues à bout de souffle et qui appartiennent désormais au passé.

Mais des industries nouvelles apparaissent notamment sur les bords du Rhin : à Chalampé, Ottmarsheim, Fessenheim, Strasbourg…

On rêve d’implantation massive d’industries lourdes pouvant faire de l’Alsace « un nouveau Texas ».
Des société étrangères s’intéressent à l’Alsace et des nouveaux noms apparaissent : TIMKEN, GENERAL MOTORS, MARS, LIEBHERR…
Pendant qu’on détruit l’ancienne industrie, une nouvelle se met progressivement en place, et globalement, la création d’emplois industriels reste positive.
Pourtant des signes inquiétants apparaissent : les mines de potasse, dont la production était destinée au secteur agricole, disparaissent en 1998, la SACM (10 000 emplois en 1955) est démantelée en 1965, des grands fleurons comme DMC ne sont plus sous contrôle alsacien, la famille HATT cède Kronenbourg…
A partir de 1974, malgré une vague de désindustrialisation, le chômage en Alsace n’est pas aussi élevé qu’ailleurs, du fait de l’embauche de nombreux Alsaciens en Suisse ou en Allemagne.
D’autre part on assiste à cette époque à un nouveau flux d’investissements étrangers : des Américains, des Suisses, des Allemands ainsi que des Japonais (notamment dans le vignoble) s’installent à leur tour pour développer leurs entreprises.
Cependant depuis 2002, on ne peut que constater une baisse continue de l’emploi industriel, malgré pourtant, la bonne implantation de nombreuses entreprises..
Le capitalisme « dynastique » a désormais fait place à un capitalisme « viager » :
entre 2002 et 2010, l’Alsace aura perdu près de 40 000 emplois industriels; son réseau d’entreprises moyennes et familiales a tendance à disparaître, ainsi que la transmission inter générationnelle.

L’Alsace reste une région industrielle importante, mais son taux de chômage a augmenté et nous devons constater un décalage d’avec le modèle rhénan que peut représenter le Bade -Wurtemberg par exemple.
Malgré ses atouts et son attractivité (diversité du tissus industriel et ses activités, importance des PME et artisanat, qualité de la main-d’œuvre) le solde d’activité apparait aujourd’hui négatif, et l’investissement étranger ne suffit plus à assurer le renouvellement du tissu industriel.

 


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